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Beyrouth, Lebanon
-"Je vois tout, je sens tout, mille détails entrent en moi comme de longues échardes et m'écorchent vive. Mille détails que d'autres ne remarquent pas parce qu'ils ont des peaux de crocodiles." Les Yeux Jaunes Des Crocodiles, Khaterine Pancol.

jeudi 17 juin 2010

Somewhere over the rainbow...


Je ne sais pas… Je sais peut-être. Tu sais, on ne sait jamais.

L’arc-en-ciel avait du mal à s’arc-bouter, mal cousu sur un semblant de bleu, par des oiseaux électriques.
Elle était couchée sur l’herbe verte sous son arbre, drapée d’une nuisette chantilly à compter les globules multicolores qui gisaient dans les veines de cet arc-en-ciel. Fusain à la main, elle dessinait, elle dessinait pour se retrouver et pour rencontrer des autres. Elle n’était ni dessinatrice, ni peintre ; ses dessins étaient des déhanchés de lettres, de mots dénoués, renoués, qui glissaient et flottaient avant de s’élargir, de s’amplifier au creux de vulgaires bouts de papiers. Elle catapultait de ses regards les ronronnements dignes de symphonies de Mozart des bolides scintillantes qui griffonnaient son cœur, et les fracassait une à une, deux à deux, trois à trois. On la disait comateuse, vaporeuse, rêveuse, même crâneuse, le vent ramenait ses cheveux en arrière alors qu’elle s’efforçait de les ramener sur son visage, comme pour cacher ses yeux embués. Ces yeux étaient étiolés par ces coups de boomerangs que lui auraient grossièrement balancés ces Adonis, ces Minos, ces Poséidon, ces Bacchus, ces XY. Vaporeuse, diaphane, le cœur exsangue, elle chavirait, elle était victime de cette curieuse névrose qui perce ces personnes pour qui l’art existe parce que la réalité ne suffit pas. Parce que le soleil de Seoul aveugle, parce que la mer est gluante, les Hommes choquants, les sables brulants et les étoiles absentes.
Elle resta ainsi, sous son arbre, tout en sachant fort bien qu’il lui suffirait d’un rien pour retrouver la terne réalité. Ces yeux perdront légèrement de leur éclat, sa nuisette sera moins jolie, ses cheveux moins longs et ses ongles moins roses, sa voix moins riante, les fleurs moins parfumées, les arbres moins grands, les éléphants plus petits…
Il était presque minuit, et j’avais écrit.

SN

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